By IWACU
Le président Evariste Ndayishimiye a sorti une déclaration, lors du 75e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’Homme. Pour lui, la protection des droits de l’Homme reste le cheval de bataille pour le Burundi. Certains politiques et activistes assurent qu’il y a des avancées, d’autres répliquent que la situation reste préoccupante.
« Je suis d’autant plus heureux que cette célébration arrive au moment où le Burundi s’attèle à la recherche du bien-être de tous sans discrimination aucune », se réjouit le président Evariste Ndayishimiye.
Il reconnaît que les Burundais ont souffert et enduré tant de malheurs, des massacres et des violations massives des droits de l’Homme, suite aux effets de la colonisation et des régimes dictatoriaux.
Pour lui, la seule voie qui vaille aujourd’hui est la guérison des âmes et des esprits pour mieux embrasser la voie du développement.
Et pour ce faire, fait-il savoir, le gouvernement du Burundi y engage fermement le peuple burundais en établissant la confiance entre les leaders et les citoyens.
Et ceci, souligne-t-il, se remarque à travers la mise en place d’un gouvernement inclusif, responsable et laborieux incitant les cadres à servir leur peuple en bon père de famille et lutter contre toute sorte d’injustice.
« Les Burundais ont déjà compris que le chemin des divisions et des discriminations n’engendre que malheur et désolation et se sont tournés vers un avenir radieux où le bien-être des citoyens est notre priorité », fait remarquer le numéro Un burundais dans sa déclaration.
L’Etat de droit avant tout
« Mon pays a fait de la bonne gouvernance et la protection des droits de l’Homme son cheval de bataille. Nous bâtissons un Etat fondé sur une justice impartiale, efficace et respectueux des droits humains et soucieux de l’équité », fait savoir le président Ndayishimiye.
Et d’annoncer que le Burundi prévoit toutes les mesures nécessaires pour prévenir l’impunité de toute violation des droits humains dans sa Constitution et son code pénal en conformité avec les conventions et pactes internationaux en matière des droits de l’Homme.
Par ailleurs, tient-il à rappeler, la récente élection du Burundi au Conseil des droits de l’Homme témoigne l’engagement et la confiance gagnée des Etats qui ont soutenu le Burundi.
Le président de la République fait savoir que le Burundi se désolidarise des solutions politiquement motivées, ciblant des Etats particuliers ainsi que la mise en œuvre des mécanismes spéciaux de façon sélective et unilatérale sans aucune forme de dialogue constructif avec les pays concernés.
« Mon pays appelle au renforcement des droits de l’Homme en adhérant aux principes fondamentaux d’universalité, de transparence, d’impartialité, de non sélectivité et d’objectivité », conclut-il.
Réactions
Vianney Ndayisaba : « La situation reste préoccupante »
« Cet anniversaire arrive au moment où la situation des droits de l’homme au Burundi reste préoccupante. Les prisons regorgent encore de gens emprisonnés sans dossiers, écroués alors qu’ils ont été libérés ou détenus sur base de petites infractions ou encore sur base de dette civile », déplore Vianney Ndayisaba, coordinateur national de l’Association de lutte contre le chômage et la torture (Aluchoto).
Et d’ajouter qu’il s’observe encore des violences envers les filles et les femmes, des violations des droits des enfants, et des cas d’impunité.
« Malgré ces multiples appels et conseils aux magistrats de lire et de dire le droit, nous constatons que certains magistrats font la sourde oreille et n’appliquent pas correctement la loi », se désole cet activiste dans la lutte contre la torture.
Il recommande l’instauration de la bonne gouvernance dans le secteur de la justice pour mettre fin aux cas de corruption qui gangrènent ce secteur.
M. Ndayisaba propose aussi la mise en place d’une commission indépendante composée par les représentants du ministère de la Justice, du Parlement, de la Cnidh et de la société civile pour suivre de près les conditions de détention.
« Ils travailleront en synergie en faisant des visites régulières dans les prisons tout en les dotant du pouvoir de libérer tout détenu en situation irrégulière », suggère-t-il.
Hamza Venant Burikukiye : « Des avancées à encourager »
« Même si tout n’est pas rose, la situation des droits de l’Homme au Burundi connaît des avancées à encourager », Hamza Venant Burikukiye, représentant légal de la Plateforme intégrale de la société civile (Pisc-Burundi) et le Collectif des associations des personnes infectées et affectées par le VIH/SIDA (Capes +).
Certes, reconnaît-il, les cas de violences faites aux femmes sont signalés ici et là. Mais, tient-il à tranquilliser, il n’y a pas de quoi s’alarmer. Le Burundi n’est pas un paradis terrestre. « Tous les cas sont punis et des sensibilisations pour décourager ces sales pratiques sont menées régulièrement dans tous les secteurs de la vie nationale », indique-t-il.
Quant à la surpopulation dans les milieux carcéraux, se réjouit cet activiste de la société civile, le gouvernement a déjà affiché sa bonne volonté de désengorger les prisons par des mesures de décourager les emprisonnements abusifs.
Pour M. Burikukiye, la Cnidh doit renforcer son action dans la sensibilisation et la formation sur les droits de l’Homme à l’’endroit des différentes couches de la population.
« Les acteurs de la société civile œuvrant dans le secteur des droits de l’Homme devraient être soutenus dans leur travail. Ils doivent aussi travailler dans le respect des lois et des institutions du pays afin d’être complémentaires et coopératifs et non être des opposants au gouvernement », recommande-t-il.
Gérard Hakizimana : « Des efforts de protection sont remarquables »
« Nous saluons les efforts faits par le gouvernement pour faire respecter les droits humains », indique Gérard Hakizimana, président et représentant légal de la Force de lutte contre le népotisme et le favoritisme au Burundi (Folucon. F)
Il note des avancées significatives tout en soulignant l’existence des institutions nationales qui sont chargées de la protection et de la promotion des droits humains, dont l’institution de l’Ombudsman et la Cnidh.
Interrogé sur les différentes violences faites aux femmes, M. Hakizimana ne les nie pas, tout en ajoutant que ces violences sont aussi commises sous d’autres cieux. Mais, pour lui, il faut en déterminer les causes et mettre en avant la prévention de ces violences.
Il déplore la surpopulation carcérale tout en saluant les mesures prises pour désengorger les prisons, dont la grâce présidentielle. Et d’informer : « Des équipes d’inspection sur les conditions de détention sont à l’œuvre et nous espérons que prochainement, certains détenus seront libérés. »
Kefa Nibizi : « Tout n’est pas rose »
« Si on compare les années 2015-2020 à aujourd’hui, on remarque qu’il y a une certaine avancée en ce qui est du respect des droits de l’Homme au Burundi », indique Kefa Nibizi, président du Conseil pour la démocratie et le développement durable au Burundi (Codebu).
Toutefois, tient-il à nuancer, il subsiste des cas d’emprisonnements arbitraires et abusifs. Et d’évoquer des gens qui sont acquittés mais qui restent écroués en prison. Des gens qui sont emprisonnés sans dossier et des personnes qui passent beaucoup de temps en prison sans jamais comparaître devant un juge.
Il y a aussi une population carcérale qui dépasse la capacité des prisons ce qui, déplore-t-il, est en quelque sorte une violation des droits humains.
Par ailleurs, ajoute-t-il, certaines organisations internationales rapportent encore des cas de torture, des personnes introuvables qui sont soupçonnées de disparition forcée. « Tous ces cas ternissent l’image du pays en ce qui est du respect des droits humains », se désole ce politicien.
M. Nibizi épingle aussi une restriction de l’espace politique qui constitue un frein pour les partis de l’opposition dans l’exercice de leurs activités.
En outre, Kefa Nibizi observe des cas d’assassinat et des violences faites aux femmes mais aussi aux hommes. Il déplore aussi des cas d’impunité avec une justice sélective qui traite les justiciables en fonction de leur appartenance politique ou d’autres formes d’influences. « Ce sont des atteintes à l’évolution positive du respect des droits humains qu’on était en train de connaître », regrette-t-il.
Il recommande d’éviter l’impunité en considérant tout le monde comme égal devant la loi et les juridictions. Il demande aussi l’ouverture de l’espace politique pour que la liberté d’expression soit garantie pour tout le monde.
Pour les cas de disparition forcée, recommande-t-il, il faudrait que le gouvernement s’investisse pour identifier les causes et les présumés auteurs et que ces derniers soient punis.
Gabriel Banzawitonde : « Que le pas déjà franchi ne recule pas »
Gabriel Banzawitonde, président du parti Apdr, atteste qu’il y a eu une amélioration au niveau du respect des droits de l’Homme au Burundi : « Auparavant, on observait beaucoup de gens qui circulaient avec des Motorola et des pistolets, intimidant la population avec des mots « Kivuyehejuru » (ça vient d’un haut). Aujourd’hui, on peut clairement dire que les choses ont changé. »
Cependant, épingle-t-il, il observe encore des magistrats qui se méconduisent en exigeant des pots de vin aux justiciables ou qui refusent de libérer les prisonniers ayant purgé leurs peines ou ayant bénéficié de la grâce présidentielle.
Il recommande aux autorités habilitées de libérer les prisonniers politiques et de garantir la liberté d’expression à l’endroit de tout citoyen.
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