By IWACU
Un nouveau Code électoral est en cours d’élaboration. La caution a été revue à la hausse, le nombre de suppléants augmenté, les propositions des partis politiques n’ont pas été prises en considération…, le projet de Code électoral, qui doit cependant passer au Parlement pour approbation, suscite déjà le débat. Les politiques dénoncent « un projet de Code électoral qui consacre un recul de la démocratie ».
Par Pascal Ntakirutimana et Jérémie Misago
La plupart des politiques approchés ont été cash avec ce projet de loi présenté lors du Conseil des ministres tenu mercredi le 6 décembre 2023 à Bujumbura. Le maître d’œuvre de ce texte est le ministre de l’Intérieur, du Développement communautaire et de la Sécurité publique. Ce projet de loi portant amendement de la loi organique n◦1/11 du 20 mai 2019 portant Code électoral a été adopté avec observations et recommandations.
Parmi les principales recommandations soulevées pour être dans cette mouture du nouveau Code électoral figure la révision à la hausse de la caution électorale pour les candidats à la présidentielle et aux législatives. « Porter la caution de candidature au poste présidentiel à cent millions de francs burundais (100.000.000BIF) et celle de la candidature au poste de Député et de Sénateur à deux millions de francs burundais (2.000.000 BIF) », lit-on dans le compte rendu de la réunion du Conseil des ministres sorti le 7 décembre 2023.
Ce n’est pas fini. Parmi les principales modifications proposées, il y aura désormais une caution électorale pour la candidature au poste de conseiller Communal. « Aux fins de limiter les déclarations fantaisistes pour les élections des Conseillers communaux, il est proposé une caution de deux cent mille francs burundais (200.000 BIF) par candidat indépendant ou par liste de candidats des partis politiques ou des coalitions des partis politiques », précise le même compte rendu.
Le projet introduit également d’autres nouveautés : désormais chaque candidat inscrit sur une liste bloquée pour les élections communales devra avoir au minimum trois suppléants. Il précise que pour faciliter l’éventuel remplacement des Conseillers Communaux sans pour autant bouleverser l’équilibre genre, il est proposé que chaque candidat inscrit sur la liste bloquée ait au moins trois suppléants, de préférence de même ethnie et de même genre. Ce projet prévoit aussi une suppression de la centralisation des résultats au niveau des centres de vote et tout ce qui s’y rapporte.
Pour rappel, selon l’article 104 de la loi organique n◦1/11 du 20 mai 2019 portant modification de la loi n◦1/20 du 3 juin 2014 portant Code électoral, la caution pour la candidature au poste de président de la République était fixée à trente millions francs burundais (30.000.000 BIF). Bien plus, selon les articles 135 et 166 de cette même loi, la caution pour les candidatures aux postes de député et sénateur s’élevait respectivement à cinq cent mille francs burundais (500.000BIF) et à quatre cent mille francs burundais (400.000BIF). Pour les élections des Conseillers Communaux, il n’y avait pas une caution prévue.
Réactions
Tatien Sibomana : « Ce Code consacre un processus électoral unilatéral et à sens unique »
Selon le politique burundais Tatien Sibomana, les principales modifications du Code électoral consacrent un processus électoral à sens unique. « Ces modifications consacrent une exclusion systématique des autres partis politiques et de leurs candidats. Même au niveau du CNDD-FDD, c’est le parti qui va payer et non les candidats. Ils ne seraient pas à mesure de le faire. On est parti d’un processus électoral unilatéral qui ne répond pas du tout aux normes et standards internationaux ».
Il déplore que le projet consacre une caution de 200 000 BIF pour les communales et 2 millions BIF pour les législatives et 100 millions pour les présidentielles. « Combien vont se payer ce luxe de donner gratuitement au trésor cette somme. Quel est ce citoyen qui a cent millions pour donner comme caution pour être candidat à la présidentielle en sachant que s’il ne totalise pas 5%, le montant ne lui sera pas restitué ».
Le projet de Code électoral prévoit que chaque candidat doit avoir trois suppléants de même ethnie et de même genre aux communales et législatives. M.Sibomana constate que c’est difficile pour les partis politiques de constituer une liste électorale. « Qu’adviendra-t-il avec trois suppléants ? Même le CNDD-FDD n’est pas capable de réussir ce pari si réellement, il veut présenter des candidats dignes et compétents ».
Pour Tatien Sibomana, le malheur du Burundi est que l’on veut allonger une liste de candidats sans tenir compte du rôle que devra jouer l’institution. « Le Code va être très difficilement applicable sauf pour le seul parti qui n’est pas contrôlé par une CENI qu’il a mise en place à sa guise. Sinon si la CENI était indépendante, le CNDD-FDD aurait des difficultés à se conformer à ces nouvelles dispositions ».
Pour lui, c’est une façon claire et nette que le CNDD-FDD veut participer seul aux élections. « Le ministre de l’Intérieur est en train de tout faire pour bloquer son principal rival, CNL, de participer de façon effective au processus électoral ».
Il déplore également la suppression de la centralisation des résultats au niveau des centres de vote. « Il était déjà difficile pour les mandataires des autres partis politiques, des observateurs et des médias d’assister à ce comptage. Qu’adviendra-t-il au moment où les urnes vont être déplacées vers d’autres lieux. Purement et simplement, ce sera un comptage du CNDD-FDD qui a l’administration, la police, l’armée et la magistrature vouée à sa cause ».
Sibomana déplore en outre le fait de supprimer la cellule technique prétextant qu’il sera difficile d’établir des responsabilités entre la CENI et l’équipe technique. Pour lui, cette dernière ne joue pas le rôle de la CENI. « Tout cela pour éviter des témoins gênants qui pourraient informer l’opinion nationale et internationale sur les fraudes liées au comptage des voix», s’indigne-t-il.
Il déplore que le CNDD-FDD fasse semblant de consulter les autres, mais il les met devant un fait accompli. « C’est le laboratoire du système en place qui fait tout. Si le CNDD-FDD fait semblant de consulter les autres partis politiques et fait des propositions, si elles ne rencontrent pas son assentiment, il les met dans le tiroir et puis avance avec son projet ».
Tatien Sibomana relève que cette marche forcée n’est pas sans conséquences. Il parle notamment d’un processus pas crédible qui donne des résultats non crédibles. « Les autorités qui en seront issues ne seront ni légales ni légitimes. En plus, n’ayant pas la légitimité et la légalité, elles auront peu de chance d’avoir un partenariat international sûr ».
Au niveau interne, les dirigeants issus des élections truquées vont gouverner sans respect de la notion de redevabilité. « Ils vont dire n’eût été notre Code, le hold-up électoral, nous ne serions pas élus. Donc, ils ne rendront pas compte aux Burundais. Ils vont s’estimer venus d’ailleurs puisque leur Code électoral est taillé sur mesure ».
Patrick Nkurunziza : « De telles mesures sont contraires à l’esprit démocratique et participatif »
Patrick Nkurunziza, président du Sahwanya FRODEBU se dit profondément déçu et mécontent à l’égard des modifications apportées par le Gouvernement du Code électoral. « Le projet de loi portant Code électoral tel que présenté ne présage en aucun cas un processus électoral transparent et équitable. En effet, il regorge de lacunes majeures que nous avons soulignées de manière répétée et qui, malheureusement, n’ont pas été prises en compte ».
Pour lui, les propositions données lors de la réunion des leaders politiques et le ministre de ‘’Intérieur ont été largement ignorées. Il explique que les modifications suggérées étaient basées sur le souci de préserver la démocratie et l’inclusion. « En analysant de près ces modifications, nous avons conclu qu’elles servent surtout à complexifier le processus électoral, créant des obstacles politiques et financiers délibérés pour exclure certains acteurs ».
Le parti Sahwanya FRODEBU exprime une profonde préoccupation face au récent plafonnement des cautions aux présidentielles, législatives et communales. Pour lui, passer de 30 millions à 100 millions de BIF pour la présidentielle souligne une déconnexion alarmante des réalités sociales, politiques et économiques du pays dénoncées par le président de la République. « En relevant ce contraste flagrant entre la dénonciation de la vie opulente et extravagante de certaines personnalités et l’augmentation exorbitante des cautions, le parti FRODEBU dénonce une incohérence manifeste dans les actions du gouvernement ».
Il considère que ces cautions inaccessibles mettent en péril la participation démocratique en excluant délibérément des candidats potentiels qui ne disposent pas de ressources financières considérables. « De telles mesures sont contraires à l’esprit démocratique et participatif, compromettant la diversité et la représentativité au sein des institutions. Cette décision exclut délibérément certains citoyens du processus électoral et témoigne d’une indifférence préoccupante à l’égard des principes démocratiques »
Il rappelle également que la désignation unilatérale des membres de la CENI par le Président de la République et son parti constitue une violation flagrante du principe fondamental de représentation équitable. « Cette approche exclut délibérément les autres acteurs socio-politiques, sapant ainsi la crédibilité du processus électoral dès le départ ».
Pour lui, le comportement affiché par le parti au pouvoir est caractérisé par une exclusion affirmée et un bouclage de l’espace politique. Cela confirme, dit-il, la crainte d’un processus électoral biaisé. « Cette attitude alimente le climat d’incertitude et de méfiance, compromettant sérieusement la légitimité des élections à venir », s’indigne le président du parti de Ndadaye.
Selon M.Nkurunziza, il y a tous les ingrédients nécessaires pour un processus électoral prédisposé ‘’à la partialité et à la distorsion’’. « Le parti Sahwanya FRODEBU exprime son vif mécontentement face à cette approche, appelant à une révision sérieuse du projet de loi afin de garantir un processus électoral véritablement démocratique, inclusif et respectueux des principes fondamentaux de la gouvernance démocratique ».
Il exhorte le gouvernement à reconnaître l’importance de la diversité d’opinions et à considérer différentes propositions pour garantir un processus électoral démocratique et inclusif. La négligence de leurs recommandations risque, prévient-il, de compromettre la légitimité des élections et d’attiser les tensions politiques.
Aloys Baricako : « Un Code qui complique les conditions de participation aux prochaines élections »
Selon Aloys Baricako, président du RANAC, parle d’un projet de loi controversé qui va faire reculer la démocratie au Burundi dans tout son ensemble. « Si le Code électoral est exclusif, ce n’est pas de nature à produire un climat électoral apaisé, à générer de bonnes élections. Au lieu d’adoucir, d’assouplir, ce sont des modifications qui viennent alourdir et compliquer les conditions de participation aux prochaines élections ».
Pour lui, c’est dommage parce que lors de la réunion du ministre de l’Intérieur, les responsables des partis politiques avaient donné des contributions pour renforcer la démocratie. C’était dit-il, favoriser la participation de plusieurs candidats/partis politiques pour les élections de 2025. « La plupart des principales modifications proposées sont celles qui viennent pour limiter le nombre des partis politiques, le nombre de candidats ou le nombre de participants aux élections de 2025 et de 2027 », se désole-t-il.
Aloys Baricako trouve que le problème se situe au niveau des élections de conseillers communaux et des députés là où les conditions de participation sont rendues difficiles. On avait demandé à ce que la caution de 200 milles BIF pour les communales supprimée et celle de la députation qui est de 2 millions BIF soit revue à la baisse, mais, nos propositions n’ont pas été prises en considération.
L’autre défi relevé concerne les documents exigés pour les candidats qui seront difficiles de réunir, dans les délais. Le conseil communal comprendra 25 membres. Sur la liste, chaque candidat doit avoir 3 suppléants, soit 100 noms sur la liste. C’est un fardeau qu’on est en train de mettre sur toutes les personnes qui espéraient se faire élire en 2025 ».
Le président du RANAC estime que la caution à la présidentielle qui passe de 30 millions à 100 millions BIF ne pose pas de problème. « Certes, c’est beaucoup d’argent. « Il n’y a pas vraiment à se plaindre, car si on peut être candidat à la présidentielle de 2027, c’est qu’on aura réuni des conseillers communaux à suffisance, la même chose pour les députés pour pouvoir se mesurer au poste de candidat-président. Le candidat sera bien préparé ».
Aloys Baricako appelle le gouvernement à engager des discussions pour dialoguer sur ce projet pour un processus démocratique et équitable. Il invite les parlementaires à ne pas voter un code qui viole les principes démocratiques.
Kefa Nibizi : « Un Code électoral taillé sur mesure »
Kefa Nibizi, président du parti CODEBU considère que les nouvelles modifications apportées dans le projet d’amendement du code électoral servent les intérêts du CNDD-FDD. « C’est un code électoral taillé sur mesure. Seules les idées et suggestions du parti au pouvoir ont été considérées. Toutes les propositions des partis politiques n’ont pas été considérées. Ce Code n’augure rien de bon pour le processus électoral. Il consacre l’exclusion ».
Il dénonce des cautions exorbitantes dans un contexte conjoncturel difficile. Il parle de l’instauration d’une caution de 200.000 pour chaque liste aux communales, soit 8400000 BIF pour les 42 communes. Il déplore une augmentation anormale pour les législatives qui passe de 500 000 par liste par province à 2 millions. Pour le candidat président, on passe de 30 millions à 100 millions. « C’est exorbitant, purement et simplement limitatif. » Il vient renforcer le fossé et les inégalités sociales dans un pays miné par la corruption et les malversations économiques.
Le président du CODEBU déplore une certaine confusion quand le gouvernement motive ces dispositions par le fait d’éviter des candidatures fantaisistes. « Tous ceux qui ont des capacités financières ne sont pas tous capables de servir la nation. Il y a ceux qui ont bonne volonté, moralité et compétences nécessaires pour servir le pays. Finalement, on risque de voir que ceux qui ont beaucoup d’argent, les corrompus se soient représentés aux présidentielles, législatives et communales ».
Pour lui, le CNDD-FDD et ses cadres ont élaboré ce projet sans considérer les préoccupations et considérations d’autres formations politiques et leurs conditions de travail. Il rappelle que le ministre de l’Intérieur avait réuni les leaders des partis politiques et que les propositions données ont été ignorées. « C’était de la poudre aux yeux pour montrer qu’il nous a consultés alors qu’il ne veut pas nous écouter. Cela confirme un Code taillé sur mesure ».
Selon Kefa Nibizi, ce Code est un recul démocratique. « On aimerait que le Parlement n’adopte pas la proposition du gouvernement tel que préparé. C’est un Code qui ne tient qu’à un seul parti au lieu des propositions qui rassurent tout le monde ».
Gabriel Banzawitonde : « Une façon de faire reculer le processus démocratique enclenché de manière difficile »
Gabriel Banzawitonde, président de l’APDR se dit surpris par le projet portant ce Code électoral. « Le parti APDR estime que c’est une façon de faire reculer le processus démocratique enclenché de manière difficile ».
Il indique que dans une réunion entre les représentants des partis politiques et le ministre de l’Intérieur tenue le 23 octobre, les partis avaient donné des contributions pour un processus électoral inclusif. « Nous avons fondamentalement demandé trois choses : supprimer la caution de 200.000 BIF proposée pour les communales, maintenir la caution de 30.000.000 BIF au lieu de 100.000.000 BIF proposée et réduire le nombre des documents exigés pour se faire élire afin de faciliter les candidats. C’est le candidat élu qui devrait les compléter ».
Le président de l’APDR dénonce cette attitude du gouvernement d’ignorer les propositions qu’il a lui-même demandées. Le ministre avait promis de les considérer. Par ailleurs, nous tenons à vous signaler que les partis politiques ne sont pas permis de bénéficier des financements extérieurs. Il devient donc difficile pour un parti d’avoir toutes ces cautions électorales et de collecter ces 100.000.000 BIF ».
Gabriel Banzawitonde considère que les modifications annoncées empiètent sur la démocratie. Il fait savoir qu’ils vont se concerter avec d’autres partis pour demander au parlement burundais de ne pas l’adopter en l’état. « Nous faisons un clin d’œil aux dirigeants que plus ils empêchent les partis politiques de participer aux élections, plus ils vont se coaliser pour essayer de mettre fin à leur pouvoir ».
Simon Bizimungu : « Ce sont des conditions d’exclure les partis politiques »
Simon Bizimungu, secrétaire général du Conseil national pour la liberté, CNL dénonce les modifications apportées qui méritent d’être analysées au fonds compte tenu de la réalité actuelle du pays. « Passer de 30 millions en 2020 à 100 millions est une pure exagération. On constate que ce sont des conditions d’exclure les partis politiques qui n’ont pas suffisamment des moyens vu que seul le parti au pouvoir a le privilège d’accéder à tous les avantages qu’offre le pays ».
Pour lui, ces amendements n’ont pas tenu compte de la conjoncture économique actuelle de notre pays. Il déplore également que les propositions d’amendements données par les partis politiques, n’ont pas été tenues en considération par le conseil des ministres.
Simon Bizimungu fait savoir que les textes normatifs burundais ont été quelquefois manipulés pour être utilisés. Ce projet de code électoral adopté par le conseil des ministres mérite d’être revu profondément avant d’être adopté par le parlement.
Jean Nduwimana : « Ces modifications ne garantissent pas un processus inclusif »
Jean Nduwimana, représentant légal de l’Association des Jeunes pour la non-violence active (AJNA) constate que certaines modifications empêchent le processus d’être inclusif. « Le fait de revoir à la hausse les cautions électorales exigées, dans le contexte actuel, est une condition posée par les pouvoirs publics tout en sachant qu’il y a peu de candidats qui peuvent la remplir ».
Il indique qu’imposer 100 millions BIF pour un candidat à la présidentielle dans une situation financière critique sème des doutes. Selon lui, ce n’est pas l’argent qui détermine un bon candidat. Un mauvais candidat, poursuit-il, peut avoir beaucoup d’argent au moment où un très bon candidat peut disposer de peu d’argent. « Celui qui n’a pas eu la chance d’être là où il peut détourner facilement de l’argent, il lui sera difficile de se faire élire au poste présidentiel », regrette-t-il.
Un candidat ne va pas montrer une preuve de payement d’une caution de cent millions pour gouverner un pays, il met en avant des programmes politiques qu’il va réaliser au cours de son mandat.
Concernant la caution aux législatives et aux communales, là aussi c’est une grosse somme. « Ces candidats sont issus des familles ordinaires, ce sont des enseignants, des fonctionnaires de l’Etat, c’est difficile pour ces gens de pouvoir réunir les deux millions », regrette M. Nduwimana.
Nduwimana demande la révision à la baisse de ces cautions électorales pour les ramener respectivement à cinquante millions pour les présidentielles, cinq cent mille pour la députation et cinquante mille pour les communales. « Il faut faciliter une participation électorale large et inclusive. Le Burundi s’est déjà engagé dans le multipartisme, nous avons besoin des candidats issus des différents horizons : dans tous les milieux du pays, partis politiques, indépendants pour permettre une compétition multicolore », renchérit M. Nduwimana.
Il demande en outre au parlement burundais de s’abstenir d’adopter un texte qui consacre l’exclusion de certains partis pour garantir un processus fiable. Pour lui, les cautions à payer pour les candidats doivent tenir en compte de la situation économique et financière des Burundais électoral avant l’adoption de ce code électoral.
Analyse
Le grand bond en arrière de la possibilité de l’alternance
La réforme de la loi électorale fait partie intégrante de la consolidation démocratique. Elle est entreprise pour améliorer le processus électoral à travers la promotion des droits électoraux des citoyens et des candidats et la mise en œuvre des principes directeurs tels que l’impartialité, l’inclusivité, la transparence, l’intégrité et la régularité.
Vu les principales modifications apportées au projet de nouveau code électoral, le Burundi semble donner raison à une citation célèbre généralement attribuée à l’ancien président congolais, Pascal Lisuba :« Un régime au pouvoir en Afrique n’organise pas les élections pour les perdre. »
Depuis que le CNDD-FDD est au pouvoir, les lois électorales ont toujours été discriminatoires, personnalisées ou taillées sur mesure pour le parti au pouvoir. Elles sont élaborées unilatéralement et imposées aux autres acteurs du jeu politique.
Pour rappel, à la veille des élections de 2010, le pouvoir a cherché à imposer son point de vue en proposant l’examen, en conseil des ministres du 9 juillet 2009, d’un projet de code électoral taillé sur mesure pour le CNDD-FDD. Le présent projet de code électoral rentre dans cette manœuvre institutionnelle.
Les principales modifications apportées à ce projet de nouveau code électoral sont un acte politiquement motivé et porté contre la démocratie libérale. Par ailleurs, au regard de la conjoncture économique du pays, revoir à la hausse la caution électorale pourrait susciter plusieurs questionnements : qu’est-ce qui a réellement motivé ce plafond de caution électorale ? Quelle solution a-t-on voulu apportée à quel problème ? Cela pourra-t-il conduire à des élections inclusives comme le veut la bonne gouvernance électorale ?
Ce projet de nouveau Code électoral vient réaffirmer le projet du parti au pouvoir de toujours imposer sa loi en recourant à des obstacles financiers et politiques pour limiter ou empêcher les autres partis politiques à se présenter aux élections.
C’est une pure et simple déconstruction autoritaire des lois de la République en général et des lois électorales en particulier par le parti au pouvoir. Or, le fait de restreindre la participation politique est singulièrement contraire à l’esprit de la démocratie et limite la possibilité de l’alternance politique.
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